• Je m'excuse d'avance pour cet article qui s'annonce "fleuve" mais après presque 4 ans de blog, je ressens aujourd'hui le besoin de revenir sur ce qu'est réellement un dispositif ULIS-école.

     

    Pourquoi ce besoin ?

    Parce que je lis et entends tout et surtout n'importe quoi ! Que ce soit sur les groupes de parents, sur les groupes de profs, à la sortie de l'école ou au parc quand je parle de mon métier, on oscille entre les clichés des années 50, les idées reçues sur le handicap au sens large et l'expérience de la belle-soeur de la voisine de mon oncle qui a connu quelqu'un qui était en classe spécialisée en 1986. Autant vous dire que si je n'avais pas déjà les cheveux courts, je me les serais sûrement arrachés depuis bien longtemps ! Alors j'explique, avec patience et bienveillance (bon OK, pas tout le temps ! Mea culpa !) le principe d'école inclusive tel qu'écrit dans les textes de lois : la loi de 2005, la circulaire de cadrage des dispositifs ULIS, ... Mais aussi et surtout MA vision de l'école inclusive et MA vision de l'enseignement spécialisé.

    Alors je me suis dit que j'allais écrire autour de ce dispositif dans lequel je passe tant de temps, physiquement et mentalement parce que, vous l'aurez compris, je n'arrête jamais ! Et, en bonne geek, j'ai partagé cette envie de "remettre l'église au milieu du village" en story sur Instagram et depuis...mon téléphone devient fou ! Je reçois des dizaines de message m'encourageant à écrire cet article, de la part de collègues mais aussi de familles. A croire qu'une petite clarification s'impose ...

     

    Commençons par le commencement...

    Je le dis et le rappelle, les classes CLIS ont disparu fin août 2005 pour laisser place aux dispositifs ULIS-école, c'est-à-dire à des unités localisées pour l'inclusion scolaire. Vous trouverez dans cette rubrique un vieil article qui présentait déjà ce changement... Allons plus loin maintenant ! Parler de "classe" quand on parle d'ULIS est donc totalement faux mais je vais y revenir un peu plus bas.

     

    A qui s'adressent les "dispo ULIS" ?

    A des élèves handicapés ? NON ! A des élèves en situation de handicap ! Je pinaille peut-être mais la formulation a son importance... En effet, la plupart des élèves que j'accueille dans le dispositif sont en situation de handicap à l'école car ils apprennent différemment des autres enfants. Ils ont besoin de plus de temps, de plus de manipulation, de plus d'attention, d'un cadre différent, etc, pour progresser. Dans la vie de tous les jours, ils jouent, font du vélo, vont à la piscine, pour une grande majorité, comme tous les enfants.

    Pour mieux comprendre la distinction entre "handicapé" et "en situation de handicap", je prends souvent l'exemple de ma taille : 1m65 sur la pointe des pieds... Quand je veux accrocher la frise numérique au-dessus du tableau, je suis en situation de handicap. Il me faut une chaise ou un escabeau pour y arriver. L'ULIS c'est l'escabeau de mes élèves ! Je n'ai pas tout le temps besoin de mon escabeau comme eux n'ont pas toujours besoin de l'ULIS !

     

    Comment bénéficier d'un dispositif ULIS-école ?

    Pour bénéficier de l'appui du dispositif ULIS-école, il faut que la MDPH notifie cette orientation. Chers parents, voici votre mission, si vous l'acceptez :

    - réunion de l'équipe éducative de votre enfant pendant laquelle sont évoquées ses difficultés et ses besoins. C'est pendant cette réunion qu'une éventuelle orientation en ULIS est généralement proposée. Les professionnels présents vous expliquent ce qu'est un dispositif ULIS, où il se trouve, et répondent à vos questions (vous savez donc déjà tout ce que j'écris ici ;) )

    - remplir un dossier MPDH (maison départementale pour les personnes handicapées) auquel vous joignez les bilans des professionnels qui suivent peut-être déjà votre enfant ainsi que le dossier GevaSco rempli par l'école.

    - Si votre dossier est complet, c'est parti pour plusieurs mois d'attente ! Les délais varient d'un département à l'autre. Pour vous donner un exemple, dans mon département, nous avons entre 6 et 9 mois d'attente avant de recevoir la notification.

    - réception de la notification : la MDPH peut accepter mais aussi refuser une orientation en ULIS-école. Si elle l'accepte, votre enfant sera affecté dans un dispositif en fonction des places disponibles et de votre adresse. Si tous les dispositifs dans un rayon raisonnable sont complets, il pourra être mis sur liste d'attente. (Si l'orientation est refusée, vous avez deux mois pour contester la décision en écrivant à la MDPH.)

    Vous comprenez donc qu'il peut se passer une, voire deux années, avant d'obtenir une place en dispositif, depuis la première réunion jusqu'à l'affectation. Il est donc important de prendre en compte ces délais dans votre décision. Quand on vous propose de faire une demande d'orientation en fin de CP par exemple, il est probable que la prise en charge ne commence qu'en début de CE2. En choisissant de différer la demande, vous différez d'autant l'admission. Ainsi si vous choisissez (et c'est votre droit le plus strict) d'attendre la fin de l'année de CE1 pour donner plus de temps à votre enfant, la prise en charge en ULIS ne pourrait commencer qu'en CM1. C'est un fait à prendre en compte (surtout que vous pouvez toujours refuser l'orientation prononcée par la MDPH).

     

    A partir de combien d'élèves un dispositif ULIS-école est-il considéré comme "complet" ?

    Un dispositif ULIS-école accueille un nombre réduit d'élèves, maximum 12 élèves (bien qu'il me semble que ce nombre ait disparu des textes récemment ...). Dans les faits, il arrive qu'un 13e voire un 14e élève soit affecté sur le dispositif dans certaines régions. Cette décision repose souvent sur le fait que la totalité des élèves n'est jamais présente dans le dispositif au même moment. Dans les faits, c'est un peu différent ...

     

    Ce qui nous amène au fonctionnement du dispositif et aux fameuses inclusions !

    Déjà à l'époque des classes CLIS, il existait des inclusions en classe ordinaire. Ces inclusions avaient souvent lieu en sport ou en arts, pas forcément dans la classe d'âge de l'élève. Ces inclusions n'existaient pas dans toutes les écoles car les CLIS étaient, comme son nom l'indique, une classe, avec cahier d'appel, liste de classe, et une douzaine d'élèves qui se rangeaient le matin avec leur enseignant.e pour monter en classe et y passer 6h, entre eux.Mais ça, c'était avant !

    Maintenant, l'élève est inscrit dans la classe ordinaire correspondant à son âge. La plupart des académies acceptent toutefois une inscription en n-1 (un élève d'âge CE2 inscrit en CE1) et même parfois en n-2 (c'est plus rare et sous certaines conditions). Chers collègues, un conseil : affûtez vos arguments parce qu'un élève d'âge CM2 inscrit en CE2, on risque de vous demander de justifier, en ESS, en rendez-vous de carrière, lors du passage du CAPPEI (ça sent le vécu...).

    L'inscription en classe de référence n'est pas une faveur ou une récompense, c'est la loi ! Après, libre à vous de définir les temps de chaque élève dans sa classe... Un directeur ne peut donc pas refuser une inscription tout comme un collègue ne peut refuser les inclusions.

    Avant d'arriver à ces fameuses inclusions, je ne résiste pas au plaisir de partager avec vous un paradoxe (ils sont nombreux !) de notre belle institution : les élèves sont inscrits dans leur classe dite "de référence" compte dans l'effectif de leur classe et donc dans ceux de l'école pour les mesures de carte scolaire. Ce n'est pas un souhait de ma part, c'est la loi ! Si vous ne me croyez pas, jetez un coup d'oeil ici ! De nombreuses écoles en France sont donc dans une situation complexe de sureffectifs parce que certaines académies refusent d'appliquer la loi. Ils disent comment dans la pub Leclerc ? Ah oui : On marche sur la tête ! C'était ma parenthèse "coup de gueule"...

     

    Quid des inclusions ? Pour quoi ? Combien ? Comment ?

    Vaste sujet... Voici les grandes lignes mais je pense qu'il mériterait un article à lui tout seul !

    Quelques éléments :

    - Etant donnée que l'élève est avant tout élève de sa classe de référence, il serait plus juste de parler de temps de prise en charge en ULIS plutôt que de temps d'inclusion en classe de référence.

    - Les temps en classe de référence sont définis par le coordonnateur ULIS, en se basant sur l'évaluation la plus fine possible de l'élève. Il faut prendre en compte le niveau scolaire, bien sûr, mais également le niveau d'autonomie et les habiletés sociales de l'enfant.

    - Ces temps peuvent changer au cours de l'année en fonction de la progression de l'élève et de son ressenti. J'ai déjà, à la demande d'un élève, suspendu des inclusions alors qu'il faisait de très gros progrès. Mais il n'était pas à l'aise et préférait revenir dans le dispositif.

    - Ces temps sont préparés et accompagnés par le coordonnateur ULIS, avant, pendant et après : préparation avec le ou la collègue de la classe de référence (support, information sur l'enfant, ...), préparation avec l'élève (une séance peut être préparée en amont pour que l'élève soit plus à l'aise en grand groupe), "reprise d'inclusion" (reprise de la séance, révision de la leçon, ...).

     

    "Zéro inclusion", est-ce possible ?

    Selon les textes, non. La vocation du dispositif ULIS est d'apporter une aide à la scolarisation en classe ordinaire. Dans les faits, il est fréquent que des élèves commencent avec 0% en classe de référence. Les temps d'inclusion (car ici il s'agit bien d'inclusion) seront donc amenés progressivement et très court au début (15 min avec le coordo ou l'AESH par exemple, juste le temps de faire un fond en peinture ou d'écouter une histoire ou un extrait musical). Dites-vous bien que passer de 0 à 15 min en période 3 puis à 30 min hebdomadaires en période 5 représente une grande victoire ! Toujours la positive attitude ...

     

    Quel accompagnement dans le dispositif ?

    Dans le dispositif, officient un coordonnateur ULIS-école et un/une AESH-co (pour "collective"). L'AESH peut encadrer un atelier ou accompagner un élève ou groupe d'élève pour une séance en classe de référence. Les missions et l'emploi du temps de l'AESH sont définis par le coordonnateur. Le travail avec l'AESH est un vrai travail d'équipe qui repose sur un respect mutuel des compétences de chacun.es.

    A noter que tous les dispositifs ULIS-école ne sont pas logés à la même enseigne : certains n'ont pas d'AESH-co et quand l'AESH doit s'absenter (maladie, congés maternité, ...), il n'est que très rarement remplacé. On ne rend alors compte de la difficulté de gérer un dispositif sans l'aide inestimable d'AESH compétents. J'ai la chance de travailler avec la meilleure d'entre elles (que j'embrasse si elle passe par ici, elle se reconnaîtra !), alors ne la cherchez pas, elle est déjà prise he

     

    Je vais finir par répondre à une question que je lis souvent sur des groupes de discussions de parents :

     

    Les élèves peuvent-ils bénéficier d'une AESH-i ou AESH-mut en ULIS-école ?

    Dans les textes, rien ne l'interdit. Dans les faits, la MDPH notifie rarement un AESH-i ou mut du fait de la présence d'un AESH-co dans le dispositif. Cependant, les élèves en ULIS TED (ou TSA) bénéficient souvent d'un accompagnant.

    A contrario, il arrive que les ULIS accueillent des élèves en attente d'une place dans une autre structure, type IME. Les demandes d'accompagnements individuels pour ces élèves sont, dans mon département, généralement refusées, avec toutes les difficultés que cela induit.

     

    Je vais m'arrêter là pour ce long article. J'espère avoir répondu à vos questions et vous avoir permis de mieux connaître le dispositif ULIS-école. Je vous invite à poser les questions qui restent en suspens en commentaire. Je m'en servirai pour cibler les prochains articles de cette rubrique wink2

     

     

     

     

     


    26 commentaires
  • La circulaire n°2015-129 du 21 août 2015 marque la fin des CLIS, classe localisée pour l'inclusion scolaire, et l'avènement des ULIS-école (unité localisée pour l'inclusion scolaire). Je vous entends d'ici : "Un mot, ça ne change pas grand chose !" Mais au final ce n'est pas qu'un mot qui est modifié mais ... deux! Car, depuis ce jour, les enseignants de CLIS ne sont plus tout à fait des professeurs des écoles, ils sont devenus ... COORDONNATEURS ULIS ! Bon OK, pour cette entrée en matière, je joue sur les mots mais notre rôle évolue...Et c'est dans ce contexte que j'ai quitté ma maternelle et mes TPS-PS pour prendre mes fonctions de "coordo" à la rentrée 2016.


    4 commentaires


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique